27 juin 2013

Dictaphones

Elle m’a dit qu’elle gardait
Les grandes boucles d’oreilles
Pour les jours où elle
Voulait conquérir le monde
Il m’a dit
Oh il m’a dit
Tant de choses
Il m’a dit de dépasser
Mes peurs bourgeoises
Oh elle m’a dit
Elle m’a dit
Que nous crèverions ensemble
Regarde nous ne vivons
Même plus sur les mêmes planètes
Il m’a dit tendrement
Qu’il n’y comprenait rien
Mais que si les autres en parlaient,
Eh bien…
Elle m’a dit qu’elle avait appelé
L’ambulance
Juste quand
Elle commençait à se sentir partir
Il m’a dit c’est un poème
Qui n’est pas sur toi
Mais pour toi
Elle m’a dit oui
On peut changer le monde
Il m’a dit je suis désolé
Pour ces années où je n’étais
Pas là
Elle m’a dit je ne sais plus
Quoi te dire
Il m’a dit que déjà il n’y avait
Que les couleurs
Dans ma bouche
Il m’a dit qu’il avait écrit ce texte
Et qu’il voulait me le montrer
Peut-être
Il m’a dit qu’il avait quitté
Les Beaux-arts pour partir sur la route
Ils m’ont dit que si je ne croyais
Plus en l’amour et en la
Musique ma fin serait proche
Il ne m’a rien dit
Il a juste regardé

Je veux leur dire
Je veux leur dire
Tant de choses
Oh les barrières saugrenues
Oh les timides envolées (…)

Tour d'ivoire

Dans les effluves de
Cigarettes
Et les vapeurs
D’alcool
Au milieu
Des plantes vertes
Et des livres
Ces heures
Pleines de musiques
Absurdes
Et délicieuses
Nous déblatérons
Des mêmes sujets
Inlassablement
Et j’ai besoin
De cette assurance
Du décalage
Et de la force
Des opinions
Les oiseaux s’égosillent
En rythme
Et les esprits
S’embrument et se fâchent
Sans cesse
Pour rebondir sans jamais atterrir
Nous sommes quatre
Mais nous sommes cents
Les répliques fusent
Dans cette nervosité précieuse
Jusqu’à l’heure de partir
On se retrouve dans la rue
Froide au petit matin
Encore engourdis
Et la voix rauque
Car nous avons gueulé
Car nous avons vécu
Ces quelques heures
Comme si demain
Ne s’avancerait jamais

Aquarelle

Le ciel projetait de la peinture,
Au fond de la piscine
On voyait des images de
Femmes des collages de corps
Et des carreaux de mosaïque
Une étrange musique
S’étalait dans l’espace
Et le bruit de l’eau
Partout ruisselait dans la tête
Il y avait de la lumière
Mais elle n’était pas
Aseptisée
Et des cris d’enfants
Sages
Au Japon les corps
Normaux
Dans l’eau et sous la neige
Les rides et les courbes
Donnaient aux photographies
Un aspect cinématographique
Etonnant
Puis la dame a parlé
De couleurs
Et j’aurai voulu me noyer
Dans les préparations chimiques
Et sur les murs de l’atelier
Je retourne en Angleterre écouter
Ton joyeux bégaiement
Et rien n’est plus doux
Que cette atroce douleur
De vous imaginer à nouveau
Ensemble
Je prends soudain conscience
De l’importance de ce vaisseau
Patraque et tout pourri
Il est l’heure de
Faire reposer ma tête
Tout contre le noir
Et tenter d’oublier
Ta vision de l’aquarelle
Et de la signification de l’orangé.

.

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