8 déc. 2013

Aéronefs

Putains d’explosions passées. Des fois je me dis que si je ne vis plus les transes, que si l’écriture ne défile plus à toute vitesse sur la page dans cet élan libérateur du poignet et cette sensation grisante du glissement de l’encre sur le papier lisse, alors alors alors il ne me sert plus à rien de vivre. Rien n’est plus important, et pourtant comme je malmène ce trésor, c’est dégueulasse. Les images viennent me visiter moins souvent, tout est moins. Les ivresses, les tristesses, les joies, les amours, les découvertes, les amitiés, les fêtes, les rires. C’est insultant, insupportable.

Des fois je préférerai retourner vivre sous la chape de plomb mentale parce que paradoxalement il y avait plus de ciel et de vois lactées visibles et palpables. Effondrement du feu charbon passif. Electricité raisonnable.

Les métamorphoses 1

les métamorphoses
ont des têtes de méduses
atroces
elles se penchent vers toi
avec une grâce noire et délicate
forment un sourire sur leurs visages
et te demandent
si tu as trouvé l'abri abstrait
si tu as vu l'arbre dont elles parlaient en rêve
sur la colline commune
les métamorphoses commencent à crier
et à chanter
en espérant réveiller les moelles
pendant qu'on marche sur les galets polis
par l'eau
leurs trois têtes roulent des yeux en rythme
et hochent et font la danse inappropriée
se revoir dans les palais délabrés
ou dans les champs de fleurs
peu importe
tant que la vie déroule son sucre acide
qui fait des étoiles sur la langue
les métamorphoses
acquiescent trois fois
tournent sur elles-mêmes
et avant qu'on ne s'en rende compte
elles ont traversé nos corps
comme des fantômes conventionnels
et on sent le reste de brume
crépiter dans nos veines
et à nos tempes
pendant des jours
et des jours
jusqu'à ce que l'effet s'estompe
et que les rictus se prélassent

4 nov. 2013

Constellations

je vous imagine comme des constellations
jumelles
laiteuses auréolées
par la fougue;
les océans noirs du Vide
ne vous impressionnent pas tellement,
il faut juste attendre en périphérie
que le temps se dilate
et vous accueille dans ses bras
dans un village sans heures
ou dans la ville aux néons roses
et aux rues criardes
n'importe quel vaisseau
capable de faire voyager votre amour
sans barrière
avec des fleurs qui tombent en lianes
ambiguës et de l'alcool
toute cette peinture baignant
dans cette lumière bleue
caractéristique
pendant un temps de douceur infinie
mais aussi dans une électricité folle
à travers diverses jungles synthétiques
où s'expriment les oiseaux
les mobylettes les oreillers et
les rires.

16 sept. 2013

Fin du carnet

Il y a un moment où le carnet
Va se finir et on ne sait jamais
Si on est prêt pour ça.
Des années après on réalise que ça
Tombait souvent à des périodes
Charnières.
L’attente.
J’attends d’éprouver mes
Peurs et mes lassitudes
Jusqu’à ce qu’elles deviennent
Impalpables et insipides.
J’attends ton amour, sincèrement, profondément.
J’attends la prochaine révélation cosmique qui
Explosera mon soleil, ridiculisant
Ses derniers faisceaux
Obliques.
J’attends la forêt qui m’avalera
Et recrachera le nécessaire.
J’attends le vaisseau et
L’équipage franc et dérangé
Qui m’invitera à ne jamais revenir.

24 août 2013

Mer synthétique

Ébullition.
Je pense à plein de choses pour ne
Pas penser
Pour faire s’évanouir les peurs
Ancrées au ventre
Les pastels grasses
Les visages sont des couleurs
Assemblées fondues
Orange très fort et bleu très pâle
J’ai fait la mer synthétique
Et les villes et les fils
Pigments lamentations ulcères
La nuit toujours l’amie fidèle […]

16 août 2013

Juke-box # 2


Amour urbain

Le ballet des martinets ;
Les oiseaux en bande
Me rappellent étrangement
Le métro de Londres
Le soleil qui se couche
Sur le canal
La plénitude du hasard
L’engouement pour la prochaine rue
Le prochain kaléidoscope humain
La nuit qui s’approche
Bienvenue et pleine de promesses insensées.

5 août 2013

Avril

Le ciel est dans la larme.
[la main broie, presse, concasse comme la machine dans les décharges]
Arc en ciel cristallin de la fatigue.
Elle écorche les tempes.
La larme témoigne de la nervosité du violet absurde et de l’interrogatoire de l’âme.
Trois cent hirondelles piaillent et fusent dans le no man’s land.
[je t’ai vu faire un pas en arrière et mon cœur a cogné contre la paroi, une fois]
Je me constate, j’observe mes tentatives désespérées et incontrôlées pour tisser les guirlandes pourpres.
J’échoue et me promet qu’on ne m’y reprendra pas, jusqu’au prochain regard évidemment.
Je repense aux citronniers et aux odeurs des étals.
Puis tout bascule dans le présent et les essais infructueux pour trouver le sommeil.
Finalement [tu] as laissé des traces, des nœuds, des ambivalences sucrées et acides, plus que je ne pouvais en douter, et toujours ta nouvelle innocence vient comme un ressac s’écraser sur ta cruauté et sur ma folie. Pourtant je ne changerai rien. Les points suédois rappellent confusément l’Andalousie, mais ce sont des souvenirs imaginés, des polaroids invisibles, je ne me suis jamais promenée dans ces rues chaudes. Elles doivent sentir la pisse, universelle. Dans les cheveux la main s’attarde. Je vois le mur, les murs et je leur adresse à chacun un sourire personnalisé.
Le magnolia perdait ses pétales nacrées et tapissait le gazon autour de la cafétéria.
Accélérations névrotiques.
Les motifs remplissent l’existence.
Je vois le petit carré de lumière et ça me rassure.
J’attends l’affaissement, la baisse de la garde, la vengeance des paupières. Rien n’arrive.
Le crâne implore le cerveau résiste. Luttes intestines. Défaite des élans.

Kielz


Ton royaume est toujours là
Il t’attend tout poussiéreux dans
Un coin de ma tête
Un vieux monstre terrifiant
Ta ville est toujours là
Kielz- sans drapeau sans odeurs
Les vagues les immeubles gris
S’emmêlent encore
Dans des soubresauts de conscience
Les enfants n’ont pas grandis mais
Leurs yeux sont plus ternes
Et leurs sourires sont tordus
Ta ville est toujours là
Prête à vivre dans ma tête
A révéler les prés aux alentours
Maintenant pleins de brouillard
Epais comme ma peur
-          Je te ferai visiter Wadingster
Tu te moqueras des jungles
Mais tu aimeras la cascade
En attendant Kielz se désagrège
Tranquillement
Au rythme des vagues.

23 juil. 2013

Léthargie

C’est toujours l’été, écrasant, dominant de sa lenteur agressive les actes et les corps qui y sont reliés. C’est toujours la ville, son corps gris et multiple, sa carcasse qui rouille et qui grince, grande léthargique avec un ballet automatique épileptique où les terrains vagues sont rares et détestés, où le moindre espace est rempli par pur confort et peur du vide.    C’est le cadeau empoisonné de la fausse agitation, les jours qui roulent la machine entêtée de l’habitude l’inconscience de soi, la rigidité du possible.
// Plan rapproché //
Dans tout cela il y a ces quelques personnes assises et allongées près du saule pleureur sur les quais, ils regardent l’eau verte sans voir le mouvement produit par le courant et parfois une phrase s’élève sans qu’elle soit nécessaire, juste là pour trancher de temps en temps le silence qui se dissout dans le bruit des voitures et du vent. Il faut surtout parler des corps, grands, presque absurdes, des omoplates saillantes et des mâchoires serrées, des mains à plat sur les cuisses nues ou posées sur le sol avec la trace des gravillons imprimés dans la paume tendre.
Il faut parler de toutes ces paires d’yeux déjà trop mélancoliques, de l’électricité et de la colère face au danger que représente la fin de l’été pour eux. Il faudra sortir de l’apesanteur, de la léthargie, de la paresse. Ils devront se mettre à marcher, à regarder les pendules et la contemplation ne sera plus possible. C’est comme s’ils avaient la mer devant eux, et il n’y a rien de plus insupportable que de savoir que ce regard là sera le dernier vers elle avant longtemps. Pourquoi devraient-ils s’arrêter de regarder le fleuve tant que celui-ci continue de couler, pourquoi est-il nécessaire de se relever et de quitter la rive tant que leurs corps sont réchauffés par le soleil ? Ils sont quatre ou cinq, on ne sait pas distinctement leur âge, où est-ce qu’ils habitent ou ce qu’ils font de leur journée. Ils sont ensembles. Des fois ils écoutent de la musique grâce à une radio que l’une des filles amène. C’est souvent les mêmes chansons mais ce n’est pas grave. Ca coule comme le fleuve et comme leurs yeux sur les choses, ça glisse sur la surface sans jamais se poser, c’est éternel les mélodies comme les étés, la jeunesse comme le fleuve. Pourtant c’est bientôt fini, ils sentent l’irrémédiable qui vient détacher leurs corps soudés dans la paresse et l’insouciance, dans l’urgence alanguie lovée dans leurs plexus et qui se déroule gracieusement dans chacun de leurs gestes jusqu’à ce que le crépuscule les livre à la frénésie assourdissante d’une fête quelconque et qu’ils abandonnent jusqu’au lendemain leur refuge amarré.

15 juil. 2013

14 juil. 2013

We found solice in melodies (Half-Cocked Boy), The Libertines

la moiteur
la chambre la pénombre
l'indifférence des fanfares
patriotiques
l'horreur de leurs tambours froids
et des cadences mortuaires
j'écoute les mêmes chansons
et chaque fois je les redécouvre
au cas où j'aurai un doute
un affaissement de la ferveur
l'été cloisonné le lit défait
café cigarettes petit soupir d'argile

12 juil. 2013

Blue birds

Blue birds
They have their very own
Burdens
They sometimes
Forget to smile
But still there is a
Special light in colors
Or on the walls
And the wheel thing starts again
Blue birds they have their very own
Inks
Sometimes they dry
And they suffocate
Sometimes they flow
In their blood stomach and throat
And then their pupils dilate themselves
And their hands shake
A little bit faster—awkwardly
Blue birds they have their very own
Fantasies
One is from Andalusia
The other one is English
They whistle
Sometimes it’s bitter
Sometimes it’s sweet
Blue birds they have their very own
Friendship
Sometimes they’re goofy
Sometimes they’re pretty melancholic
Blue birds
They have their very own adventure
A few know the bound
A few take it seriously
But the blue birds they don’t care
They step forward and backward
Like hesitant Polaroids
Melting under some
Spectacular lemon trees
Waiting for the wind
To take their souls
Away.

8 juil. 2013

/

Cimetières virtuels
Pompéi d’images et de mots
Cendres hâtives
Oublis précipités
Hontes adéquates
Et dénis simultanés
Tout cela ressurgira
Dans un temps incertain
Des archives-sourires moqueurs
Exhumer la jeunesse assise
Et son impatience
Son inconstance
Sa lâcheté
Et sa fragile beauté dramatique

27 juin 2013

Dictaphones

Elle m’a dit qu’elle gardait
Les grandes boucles d’oreilles
Pour les jours où elle
Voulait conquérir le monde
Il m’a dit
Oh il m’a dit
Tant de choses
Il m’a dit de dépasser
Mes peurs bourgeoises
Oh elle m’a dit
Elle m’a dit
Que nous crèverions ensemble
Regarde nous ne vivons
Même plus sur les mêmes planètes
Il m’a dit tendrement
Qu’il n’y comprenait rien
Mais que si les autres en parlaient,
Eh bien…
Elle m’a dit qu’elle avait appelé
L’ambulance
Juste quand
Elle commençait à se sentir partir
Il m’a dit c’est un poème
Qui n’est pas sur toi
Mais pour toi
Elle m’a dit oui
On peut changer le monde
Il m’a dit je suis désolé
Pour ces années où je n’étais
Pas là
Elle m’a dit je ne sais plus
Quoi te dire
Il m’a dit que déjà il n’y avait
Que les couleurs
Dans ma bouche
Il m’a dit qu’il avait écrit ce texte
Et qu’il voulait me le montrer
Peut-être
Il m’a dit qu’il avait quitté
Les Beaux-arts pour partir sur la route
Ils m’ont dit que si je ne croyais
Plus en l’amour et en la
Musique ma fin serait proche
Il ne m’a rien dit
Il a juste regardé

Je veux leur dire
Je veux leur dire
Tant de choses
Oh les barrières saugrenues
Oh les timides envolées (…)

Tour d'ivoire

Dans les effluves de
Cigarettes
Et les vapeurs
D’alcool
Au milieu
Des plantes vertes
Et des livres
Ces heures
Pleines de musiques
Absurdes
Et délicieuses
Nous déblatérons
Des mêmes sujets
Inlassablement
Et j’ai besoin
De cette assurance
Du décalage
Et de la force
Des opinions
Les oiseaux s’égosillent
En rythme
Et les esprits
S’embrument et se fâchent
Sans cesse
Pour rebondir sans jamais atterrir
Nous sommes quatre
Mais nous sommes cents
Les répliques fusent
Dans cette nervosité précieuse
Jusqu’à l’heure de partir
On se retrouve dans la rue
Froide au petit matin
Encore engourdis
Et la voix rauque
Car nous avons gueulé
Car nous avons vécu
Ces quelques heures
Comme si demain
Ne s’avancerait jamais

Aquarelle

Le ciel projetait de la peinture,
Au fond de la piscine
On voyait des images de
Femmes des collages de corps
Et des carreaux de mosaïque
Une étrange musique
S’étalait dans l’espace
Et le bruit de l’eau
Partout ruisselait dans la tête
Il y avait de la lumière
Mais elle n’était pas
Aseptisée
Et des cris d’enfants
Sages
Au Japon les corps
Normaux
Dans l’eau et sous la neige
Les rides et les courbes
Donnaient aux photographies
Un aspect cinématographique
Etonnant
Puis la dame a parlé
De couleurs
Et j’aurai voulu me noyer
Dans les préparations chimiques
Et sur les murs de l’atelier
Je retourne en Angleterre écouter
Ton joyeux bégaiement
Et rien n’est plus doux
Que cette atroce douleur
De vous imaginer à nouveau
Ensemble
Je prends soudain conscience
De l’importance de ce vaisseau
Patraque et tout pourri
Il est l’heure de
Faire reposer ma tête
Tout contre le noir
Et tenter d’oublier
Ta vision de l’aquarelle
Et de la signification de l’orangé.

.

                                                        Recommencer
                                                c'est piétiner des cendres
                                                        pour les raviver.